Guide d'Évaluation Globale des Risques

Pour les cabinets comptables belges en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme

Conformément à l'article 16 de la loi du 18 septembre 2017

Ce guide a été conçu pour aider les cabinets comptables belges à réaliser leur évaluation globale des risques en matière de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme (BC/FT), conformément aux exigences légales. Il fournit une méthodologie pratique, des outils et des modèles pour faciliter cette démarche essentielle à la mise en conformité de votre cabinet.

À propos de ce guide :

Ce document propose une approche structurée pour réaliser l'évaluation globale des risques au niveau de votre cabinet, étape indispensable avant l'évaluation individuelle des risques par client. Il vous accompagne tout au long du processus, de la compréhension des obligations légales jusqu'à la production d'un rapport documenté.

À qui s'adresse ce guide ?

  • Experts-comptables externes
  • Conseils fiscaux externes
  • Cabinets comptables de toutes tailles
  • Responsables anti-blanchiment (AMLCO)

Objectifs de ce guide

  • Comprendre les obligations légales
  • Méthodologie structurée et pratique
  • Modèles et outils prêts à l'emploi
  • Mise en conformité simplifiée

Note : Ce guide est basé sur la loi du 18 septembre 2017 relative à la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme et à la limitation de l'utilisation des espèces, ainsi que sur la norme de l'Institut des Experts-comptables et des Conseils fiscaux (ITAA) du 31 mars 2020.

1. L'obligation légale d'évaluation globale des risques

L'article 16 de la loi du 18 septembre 2017 impose à toutes les entités assujetties, dont les professionnels comptables, de prendre des mesures appropriées et proportionnées à leur nature et à leur taille pour identifier et évaluer les risques de BC/FT auxquels ils sont exposés.

Article 16 de la loi du 18 septembre 2017 :

"Les entités assujetties prennent des mesures appropriées et proportionnées à leur nature et à leur taille pour identifier et évaluer les risques de BC/FT auxquels elles sont exposées, en tenant compte, notamment, des caractéristiques de leurs clientèles, des produits, services ou opérations qu'elles proposent, des pays ou zones géographiques concernées, et des canaux de distribution auxquels elles ont recours."

Pourquoi réaliser une évaluation globale des risques ?

Objectifs réglementaires

  • Se conformer aux obligations légales
  • Éviter les sanctions administratives (amendes de 250 à 1.250.000 euros)
  • Prévenir les risques de sanctions disciplinaires par l'ITAA
  • Démontrer sa diligence en cas de contrôle

Bénéfices pour le cabinet

  • Meilleure connaissance des risques spécifiques au cabinet
  • Allocation optimisée des ressources de conformité
  • Fondement pour la définition des politiques internes
  • Protection de la réputation du cabinet

Qui est responsable de l'évaluation globale des risques ?

Selon la norme de l'ITAA du 31 mars 2020, l'évaluation globale des risques est établie et exécutée sous la responsabilité effective de l'AMLCO (Anti-Money Laundering Compliance Officer), mais doit être approuvée au plus haut niveau par l'organe légal d'administration ou la direction effective.

Important :

L'évaluation globale des risques n'est pas une simple formalité administrative. Elle constitue le fondement de votre approche basée sur les risques et conditionne de nombreux aspects de votre dispositif anti-blanchiment (politique d'acceptation des clients, niveau de vigilance, contrôles internes, etc.).

Quand réaliser ou mettre à jour l'évaluation globale des risques ?

Situation Action requise
Première mise en conformité Réalisation initiale de l'évaluation globale des risques
Modification significative (nouvelle activité, nouvelle clientèle, etc.) Mise à jour immédiate de l'évaluation globale des risques
Évolution de la législation ou de la réglementation Mise à jour de l'évaluation globale des risques
Évolution de l'analyse nationale des risques Mise à jour de l'évaluation globale des risques
Révision périodique Au moins une fois par an (vérification par l'AMLCO)

2. Méthodologie étape par étape

La réalisation de l'évaluation globale des risques suit une méthodologie structurée en 6 étapes, qui vous permettra d'identifier, d'analyser et d'évaluer les risques de BC/FT propres à votre cabinet.

Étape 1

Collecte d'informations

Rassembler les données pertinentes sur votre cabinet, ses activités et sa clientèle

Étape 2

Identification des risques

Identifier les risques inhérents à votre activité en tenant compte des facteurs de risque

Étape 3

Analyse des risques

Évaluer la probabilité et l'impact de chaque risque identifié

Étape 4

Définition des catégories

Établir des catégories de risques pour classifier vos clients

Étape 5

Mesures d'atténuation

Définir les contrôles et procédures pour atténuer les risques identifiés

Étape 6

Documentation

Formaliser l'évaluation globale des risques dans un rapport documenté

Étape 1 : Collecte d'informations

Cette première étape consiste à rassembler toutes les informations pertinentes concernant votre cabinet, ses activités et sa clientèle. Ces informations serviront de base à l'identification des risques.

Checklist des informations à collecter :

  • Structure et organisation du cabinet
  • Effectifs et compétences des collaborateurs
  • Types de missions réalisées (comptabilité, fiscalité, conseil, etc.)
  • Volume d'activité par type de mission
  • Modes d'entrée en relation avec les clients
  • Canaux de distribution utilisés
  • Typologie de la clientèle (particuliers, PME, grandes entreprises, etc.)
  • Secteurs d'activité des clients
  • Zones géographiques des clients
  • Incidents ou déclarations de soupçon antérieurs
  • Contrôles internes existants
  • Formations déjà dispensées aux collaborateurs

Étape 2 : Identification des risques

Sur la base des informations collectées, identifiez les risques de BC/FT inhérents à votre activité en tenant compte des facteurs de risque définis dans la loi et ses annexes (voir section 3 de ce guide).

Conseil pratique :

Pour une identification exhaustive des risques, organisez une session de brainstorming avec les principales parties prenantes du cabinet (associés, AMLCO, responsables de mission, etc.) et utilisez la technique des "5 pourquoi" pour approfondir l'analyse de chaque risque potentiel.

Étape 3 : Analyse des risques

Pour chaque risque identifié, évaluez sa probabilité d'occurrence et son impact potentiel. Cette analyse peut être réalisée de manière qualitative (faible, moyen, élevé) ou quantitative (échelle de 1 à 5).

Risque identifié Probabilité Impact Niveau de risque global
Clients opérant dans des secteurs à risque élevé (immobilier, commerce de pierres précieuses, etc.) Moyenne (3/5) Élevé (4/5) Élevé (12/25)
Clients avec structures de détention complexes Moyenne (3/5) Élevé (5/5) Très élevé (15/25)
Transactions ou opérations en espèces Faible (2/5) Élevé (4/5) Moyen (8/25)
Clients non résidents ou établis dans des pays à risque Faible (1/5) Élevé (4/5) Faible (4/25)

Note : Le niveau de risque global peut être calculé en multipliant la probabilité par l'impact. D'autres méthodes de calcul sont possibles selon la méthodologie choisie.

Étape 4 : Définition des catégories de risques

Sur la base de votre analyse, définissez des catégories de risques qui vous permettront de classifier vos clients et d'appliquer des mesures de vigilance proportionnées. La section 5 de ce guide détaille cette étape.

Étape 5 : Mesures d'atténuation

Identifiez et mettez en place des contrôles et procédures pour atténuer les risques identifiés. Ces mesures doivent être proportionnées au niveau de risque et aux ressources de votre cabinet.

Niveau de risque Exemples de mesures d'atténuation
Faible
  • Vigilance simplifiée (dans les limites prévues par la loi)
  • Contrôles périodiques standards
  • Mise à jour des informations tous les 2-3 ans
Moyen
  • Vigilance standard
  • Contrôles réguliers
  • Mise à jour annuelle des informations
  • Formation ciblée du personnel
Élevé
  • Vigilance renforcée
  • Approbation au niveau de la direction
  • Contrôles approfondis et fréquents
  • Mise à jour semestrielle des informations
  • Formation spécifique du personnel

Étape 6 : Documentation

Formalisez votre évaluation globale des risques dans un rapport documenté qui doit être tenu à disposition de l'ITAA sur papier ou support électronique. La section 6 de ce guide détaille les éléments à inclure dans cette documentation.

3. Les facteurs à prendre en compte

La loi du 18 septembre 2017 et la norme de l'ITAA du 31 mars 2020 précisent les facteurs à prendre en considération dans l'évaluation globale des risques. Ces facteurs sont détaillés dans les annexes de la loi et de la norme.

Variables de l'annexe I

L'article 1er de l'annexe I de la norme de l'ITAA liste les variables à prendre au minimum en considération dans l'évaluation globale des risques :

Finalité

La finalité d'un compte ou d'une relation d'affaires

Niveau d'actifs

Le niveau d'actifs déposés par un client ou le volume des opérations effectuées

Durée

La régularité ou la durée de la relation d'affaires

Facteurs de risque potentiellement moins élevé (annexe II)

L'annexe II de la norme de l'ITAA liste les facteurs indicatifs d'un risque potentiellement moins élevé, répartis en trois catégories :

Facteurs de risques inhérents aux clients

  • Sociétés cotées sur un marché réglementé
  • Administrations ou entreprises publiques
  • Clients résidant dans des zones géographiques à risque moins élevé

Facteurs de risques liés aux produits, services, opérations ou canaux de distribution

  • Contrats d'assurance-vie dont la prime est faible
  • Contrats d'assurance retraite sans clause de rachat anticipé
  • Régimes conventionnels de retraite
  • Produits d'inclusion financière
  • Produits dont les risques de BC/FT sont contrôlés par d'autres facteurs

Facteurs de risques géographiques

  • États membres de l'UE
  • Pays tiers dotés de systèmes efficaces de lutte contre le BC/FT
  • Pays tiers identifiés comme présentant un faible niveau de corruption
  • Pays tiers appliquant les recommandations du GAFI

Facteurs de risque potentiellement plus élevé (annexe III)

L'annexe III de la norme de l'ITAA liste les facteurs indicatifs d'un risque potentiellement plus élevé, également répartis en trois catégories :

Facteurs de risques inhérents aux clients

  • Relation d'affaires dans des circonstances inhabituelles
  • Clients résidant dans des zones géographiques à haut risque
  • Structures de détention d'actifs personnels
  • Sociétés avec actionnaires apparents ou actions au porteur
  • Activités nécessitant beaucoup d'espèces
  • Structure de propriété inhabituelle ou complexe

Facteurs de risques liés aux produits, services, transactions ou canaux de distribution

  • Services de banque privée
  • Produits ou transactions favorisant l'anonymat
  • Relations d'affaires sans présence physique des parties
  • Paiements reçus de tiers inconnus
  • Nouveaux produits et nouvelles pratiques commerciales

Facteurs de risques géographiques

  • Pays non dotés de systèmes efficaces de lutte contre le BC/FT
  • Pays présentant des niveaux significatifs de corruption
  • Pays faisant l'objet de sanctions ou d'embargos
  • Pays finançant ou soutenant des activités terroristes

Analyse nationale des risques

Conformément à l'article 68 de la loi du 18 septembre 2017, les organes de coordination en matière de lutte contre le BC/FT procèdent à une évaluation nationale des risques. Cette analyse nationale doit être prise en compte dans l'évaluation globale des risques de votre cabinet.

Conseil pratique :

Consultez régulièrement le site du SPF Économie et de la CTIF pour vous tenir informé des mises à jour de l'analyse nationale des risques en Belgique. Intégrez ces informations dans votre propre évaluation globale des risques.

Cas spécifiques pour les comptables

Pour les cabinets comptables, certains facteurs de risque spécifiques doivent être particulièrement pris en compte :

Catégorie Facteurs de risque spécifiques aux cabinets comptables
Types de clients
  • Clients opérant dans des secteurs à risque (immobilier, HORECA, commerce de luxe, etc.)
  • Clients ayant une forte proportion de transactions en espèces
  • Clients avec une structure de détention complexe ou opaque
  • Clients ayant des activités dans des pays à risque
Types de services
  • Constitution de sociétés ou de structures juridiques complexes
  • Services de domiciliation
  • Assistance dans les opérations immobilières
  • Assistance dans les restructurations d'entreprises
  • Conseil en matière d'optimisation fiscale internationale
Canaux de distribution
  • Relations d'affaires à distance (sans rencontre physique)
  • Clients introduits par des intermédiaires ou des apporteurs d'affaires
  • Clients provenant de réseaux internationaux

4. Modèles de matrices de risques

Pour faciliter l'évaluation et la visualisation des risques, vous pouvez utiliser différents modèles de matrices de risques adaptés aux cabinets comptables. Voici quelques exemples que vous pouvez adapter à votre contexte.

Matrice de probabilité et d'impact

Cette matrice classique permet de positionner les risques identifiés selon leur probabilité d'occurrence et leur impact potentiel.

Impact faible (1) Impact moyen (2) Impact élevé (3)
Probabilité élevée (3) Risque moyen (3)
Ex: Clients secteur HORECA
Risque élevé (6)
Ex: Transactions en espèces importantes
Risque très élevé (9)
Ex: Structures complexes avec pays à risque
Probabilité moyenne (2) Risque faible (2)
Ex: Nouveaux types de missions
Risque moyen (4)
Ex: Clients récents à forte croissance
Risque élevé (6)
Ex: Relations d'affaires à distance
Probabilité faible (1) Risque très faible (1)
Ex: Clients du secteur public
Risque faible (2)
Ex: PME familiales établies
Risque moyen (3)
Ex: Clients avec activités internationales

Note explicative :

Dans cette matrice, le niveau de risque global est calculé en multipliant la probabilité par l'impact (P x I). On obtient ainsi trois niveaux de risque :

  • Risque faible (1-2) : Vigilance standard
  • Risque moyen (3-4) : Vigilance accrue
  • Risque élevé (6-9) : Vigilance renforcée

Matrice de risque par type de client et de service

Cette matrice permet de croiser le type de client avec le type de service pour déterminer le niveau de risque global.

Services à faible risque
(Comptabilité standard, paie)
Services à risque moyen
(Conseil fiscal, représentation)
Services à risque élevé
(Constitution de sociétés, restructurations)
Clients à risque élevé
(Secteurs sensibles, structure complexe)
Risque moyen
Vigilance accrue
Risque élevé
Vigilance renforcée
Risque très élevé
Vigilance très renforcée
Autorisation de la direction
Clients à risque moyen
(PME standard, professions libérales)
Risque faible
Vigilance standard
Risque moyen
Vigilance accrue
Risque élevé
Vigilance renforcée
Clients à faible risque
(Secteur public, sociétés cotées)
Risque très faible
Vigilance simplifiée
Risque faible
Vigilance standard
Risque moyen
Vigilance accrue

Exemple concret d'application

Voici un exemple concret d'évaluation des risques pour un cabinet comptable de taille moyenne :

Risque identifié Probabilité Impact Niveau de risque Mesures d'atténuation
Clients du secteur immobilier Élevée (3/3) Élevé (3/3) Très élevé (9/9)
  • Procédure d'acceptation renforcée
  • Vérification approfondie de l'origine des fonds
  • Vigilance accrue sur les transactions
  • Formation spécifique des collaborateurs
Clients avec activités internationales Moyenne (2/3) Élevé (3/3) Élevé (6/9)
  • Vérification approfondie des bénéficiaires effectifs
  • Contrôle renforcé des flux financiers
  • Validation par un associé
  • Mise à jour semestrielle du dossier client
Nouveaux clients sans recommandation Moyenne (2/3) Moyen (2/3) Moyen (4/9)
  • Procédure de vérification renforcée
  • Période d'observation de 6 mois
  • Contrôle de cohérence trimestriel
Relations sans présence physique Faible (1/3) Moyen (2/3) Faible (2/9)
  • Identification électronique sécurisée
  • Vérification documentaire supplémentaire
  • Suivi régulier par visioconférence

5. Définir les catégories de risques

Conformément à l'article 19 de la loi du 18 septembre 2017 et au point 3.5 de la norme de l'ITAA, chaque professionnel doit définir plusieurs catégories de risques, auxquelles sont associées des mesures de vigilance appropriées.

"Ces catégories de risques sont établies sur la base de l'évaluation globale du risque, visée à l'article 16 de la Loi et des critères objectifs de risque qui sont combinés de manière cohérente." (point 3.6 de la norme de l'ITAA)

Nombre et types de catégories de risques

La loi n'impose pas un nombre spécifique de catégories de risques, mais prévoit au minimum une distinction entre les risques faibles et les risques élevés. En pratique, la plupart des cabinets optent pour trois catégories de risques :

Risque faible

Clients et opérations présentant des caractéristiques à faible risque, permettant l'application de mesures de vigilance simplifiée (dans les limites prévues par la loi).

Risque standard

Clients et opérations ne présentant ni caractéristiques à risque faible, ni caractéristiques à risque élevé, nécessitant des mesures de vigilance standard.

Risque élevé

Clients et opérations présentant des caractéristiques à risque élevé, nécessitant des mesures de vigilance renforcée conformément aux articles 37 à 41 de la loi.

Conseil pratique :

Selon la taille et la diversité de votre clientèle, vous pouvez adopter un modèle plus granulaire avec 4 ou 5 catégories de risques. L'essentiel est que ces catégories soient clairement définies et associées à des mesures de vigilance adaptées.

Critères objectifs de classification

Pour associer chaque client à une catégorie de risque, vous devez définir des critères objectifs. Ces critères doivent être combinés de manière cohérente et documentés dans vos procédures internes. Voici quelques exemples de critères :

Critère Risque faible Risque standard Risque élevé
Type de client
  • Société cotée
  • Entité publique
  • Société régulée
  • PME établie
  • Profession libérale
  • Association reconnue
  • Société avec structure complexe
  • Client avec PPE
  • Trust ou construction juridique similaire
Secteur d'activité
  • Services professionnels régulés
  • Industrie manufacturière
  • Commerce de détail standard
  • Commerce de gros
  • Transport
  • Construction
  • Immobilier
  • HORECA
  • Commerce de biens de luxe
  • Commerce d'art et antiquités
Zone géographique
  • Belgique
  • UE
  • Pays de l'OCDE à faible risque
  • Pays hors UE à risque modéré
  • Pays émergents standards
  • Pays tiers à haut risque
  • Pays sous sanctions
  • Paradis fiscaux
  • Pays à corruption élevée
Canal de distribution
  • Relation directe établie de longue date
  • Recommandation par un client fiable
  • Nouveau client direct
  • Recommandation professionnelle
  • Relation à distance
  • Apporteur d'affaires
  • Sans recommandation vérifiable

Système de scoring

Pour faciliter la classification des clients, vous pouvez mettre en place un système de scoring. Chaque critère se voit attribuer un poids et une note, permettant de calculer un score global qui détermine la catégorie de risque.

Critère Poids Score 1 (Faible) Score 2 (Standard) Score 3 (Élevé)
Type de client 30% Société cotée, entité publique PME standard, profession libérale Structure complexe, présence de PPE
Secteur d'activité 25% Services régulés, industrie Construction, transport Immobilier, HORECA, biens de luxe
Zone géographique 20% Belgique, UE Hors UE risque modéré Pays à haut risque, paradis fiscaux
Canal de distribution 15% Relation directe établie Nouveau client direct Relation à distance, apporteur
Mode de paiement 10% Virement bancaire standard Paiement électronique Espèces, pays tiers

Exemple de calcul :

Pour un client, le score global serait calculé comme suit :

Score = (Note critère 1 × Poids critère 1) + (Note critère 2 × Poids critère 2) + ... + (Note critère n × Poids critère n)

Par exemple, pour un client PME dans l'immobilier en Belgique, relation directe, paiement par virement :

(2 × 30%) + (3 × 25%) + (1 × 20%) + (2 × 15%) + (1 × 10%) = 0,6 + 0,75 + 0,2 + 0,3 + 0,1 = 1,95

Avec une échelle où :

  • 1 à 1,67 = Risque faible
  • 1,68 à 2,33 = Risque standard
  • 2,34 à 3 = Risque élevé

Ce client serait classé en risque standard (score de 1,95).

Cas particuliers à risque élevé

Indépendamment du système de scoring, certaines situations doivent automatiquement être classées à risque élevé, conformément aux articles 37 à 41 de la loi :

Attention :

Les cas de risque élevé imposés par la loi (articles 37 à 41) doivent être pris en compte dans vos catégories de risques, quel que soit le système de scoring que vous utilisez.

6. Documentation et mise à jour

L'évaluation globale des risques doit être documentée, mise à jour et tenue à la disposition de l'ITAA sur papier ou support électronique, conformément au point 3.3 de la norme.

Contenu du rapport d'évaluation globale des risques

Le rapport d'évaluation globale des risques doit comprendre les éléments suivants :

Éléments essentiels du rapport :

  • Description du cabinet, de ses activités et de sa clientèle
  • Méthodologie utilisée pour l'évaluation des risques
  • Identification et analyse des risques de BC/FT
  • Matrice de risques et justification
  • Définition des catégories de risques
  • Mesures d'atténuation mises en place
  • Procédures de mise à jour
  • Approbation par l'organe de direction

Mise à jour de l'évaluation globale des risques

Conformément au point 3.8 de la norme de l'ITAA, l'évaluation globale des risques doit être mise à jour chaque fois que se produit un événement susceptible d'avoir un impact significatif sur un ou plusieurs risques.

Fréquence Actions requises Responsable
En continu
  • Veille sur les évolutions législatives et réglementaires
  • Suivi des typologies de BC/FT publiées par la CTIF
  • Suivi des modifications significatives dans l'activité du cabinet
AMLCO
Événementielle
  • Mise à jour suite à un changement significatif (nouvelle activité, nouvelle clientèle, etc.)
  • Mise à jour suite à une modification législative ou réglementaire
  • Mise à jour suite à une nouvelle analyse nationale des risques
AMLCO avec approbation au plus haut niveau
Annuelle
  • Vérification par l'AMLCO que l'évaluation globale des risques est toujours actuelle
  • Communication des conclusions à l'organe légal d'administration ou à la direction effective
  • Inclusion des conclusions dans le rapport annuel d'activité de l'AMLCO
AMLCO avec information au plus haut niveau

Conseil pratique :

Planifiez une réunion annuelle dédiée à la revue de l'évaluation globale des risques, impliquant l'AMLCO, la personne responsable au plus haut niveau et les principaux responsables de mission. Cette réunion permettra de partager les expériences et d'identifier d'éventuels nouveaux risques.

Impact sur les évaluations individuelles des risques

La mise à jour de l'évaluation globale des risques implique, le cas échéant, que soient également mises à jour les évaluations individuelles des risques visées à l'article 19, §2, alinéa 1er de la loi.

Important :

Lorsque vous modifiez vos catégories de risques ou vos critères de classification, vous devez réévaluer les clients existants selon les nouveaux paramètres, ce qui peut entraîner un changement de catégorie de risque pour certains clients et, par conséquent, une adaptation des mesures de vigilance appliquées.

7. Modèle de rapport d'évaluation globale des risques

Vous trouverez ci-dessous un modèle de rapport d'évaluation globale des risques que vous pouvez adapter à votre cabinet. Ce modèle couvre tous les éléments requis par la loi et la norme de l'ITAA.

MODÈLE DE RAPPORT D'ÉVALUATION GLOBALE DES RISQUES

1. INFORMATIONS GÉNÉRALES

Nom du cabinet : [À compléter]

Adresse : [À compléter]

Personne responsable au plus haut niveau : [À compléter]

AMLCO : [À compléter]

Date de réalisation : [À compléter]

Date de dernière mise à jour : [À compléter]

2. DESCRIPTION DU CABINET ET DE SES ACTIVITÉS

Structure et organisation : [Description de la structure juridique, nombre d'associés, de collaborateurs, etc.]

Types de services proposés : [Comptabilité, fiscalité, conseil, etc. avec pourcentage approximatif de chaque activité]

Clientèle : [Description de la typologie de la clientèle, secteurs d'activité, zones géographiques, etc.]

Canaux de distribution : [Comment les clients entrent en relation avec le cabinet]

3. MÉTHODOLOGIE D'ÉVALUATION DES RISQUES

Approche adoptée : [Description de la méthode utilisée pour identifier et évaluer les risques]

Sources d'information utilisées : [Loi, norme ITAA, analyse nationale des risques, guides de la CTIF, etc.]

Matrice de risques : [Description de la matrice utilisée pour évaluer les risques]

4. IDENTIFICATION ET ANALYSE DES RISQUES

Risques liés aux clients : [Identification et analyse des risques liés aux types de clients]

Risques liés aux services : [Identification et analyse des risques liés aux services proposés]

Risques liés aux zones géographiques : [Identification et analyse des risques liés aux zones géographiques]

Risques liés aux canaux de distribution : [Identification et analyse des risques liés aux canaux de distribution]

5. ÉVALUATION DES RISQUES

[Tableau détaillé des risques identifiés avec leur probabilité, leur impact et leur niveau de risque global]

6. CATÉGORIES DE RISQUES

Définition des catégories : [Description des catégories de risques définies (faible, standard, élevé) et des critères d'affectation]

Système de scoring : [Description du système de scoring utilisé pour classifier les clients]

Cas particuliers : [Mention des cas devant automatiquement être classés à risque élevé conformément à la loi]

7. MESURES D'ATTÉNUATION DES RISQUES

Mesures organisationnelles : [Description des mesures organisationnelles mises en place]

Procédures internes : [Description des procédures internes mises en place]

Formation du personnel : [Description des formations dispensées au personnel]

Contrôles internes : [Description des contrôles internes mis en place]

8. MISE À JOUR DE L'ÉVALUATION GLOBALE DES RISQUES

Processus de mise à jour : [Description du processus de mise à jour de l'évaluation globale des risques]

Fréquence de révision : [Indication de la fréquence de révision de l'évaluation globale des risques]

Événements déclencheurs : [Liste des événements déclenchant une mise à jour anticipée]

9. APPROBATION

Date d'approbation : [À compléter]

Approuvé par : [Nom et fonction de la personne responsable au plus haut niveau]

Signature : ______________________________

ANNEXES

Annexe 1 : Matrice de risques détaillée

Annexe 2 : Liste des pays à haut risque

Annexe 3 : Procédures internes

Annexe 4 : [Autres annexes pertinentes]

Note importante :

Ce modèle est fourni à titre indicatif et doit être adapté à la situation spécifique de votre cabinet. L'évaluation globale des risques doit refléter les risques réels auxquels votre cabinet est exposé et être régulièrement mise à jour.

Conclusion

L'évaluation globale des risques est une étape fondamentale dans la mise en conformité de votre cabinet avec la législation anti-blanchiment. Elle vous permet d'identifier les risques spécifiques auxquels vous êtes exposé et de mettre en place des mesures proportionnées pour les atténuer.

En suivant la méthodologie et les outils proposés dans ce guide, vous pourrez réaliser une évaluation globale des risques complète et conforme aux exigences légales, tout en optimisant vos ressources de conformité.

N'oubliez pas que l'évaluation globale des risques n'est pas une fin en soi, mais le point de départ d'une approche basée sur les risques qui doit se refléter dans l'ensemble de votre dispositif anti-blanchiment, notamment dans votre politique d'acceptation des clients, vos procédures de vigilance et vos contrôles internes.

Pour aller plus loin :

  • Consultez régulièrement le site de la CTIF pour vous tenir informé des typologies de blanchiment
  • Suivez les communications de l'ITAA concernant la lutte contre le blanchiment
  • Participez aux formations proposées par l'ITAA sur cette thématique
  • Échangez avec vos pairs sur les bonnes pratiques en matière d'évaluation des risques